Aujourd’hui illégal, ce procédé garde des survivances qui, de temps à autre, défrayent la chronique.
Le gerrymandering est une expression qui associe le nom de famille d’Elbridge Thomas
Un cas de gerrymandering (capture d’écran-DS)
Gerry (1744-1814), un célèbre homme politique américain, à celui de la salamandre, salamander en anglais. Une contorsion sémantique qui n’a d’équivalent que la gymnastique à laquelle avait eu recours ce 9e gouverneur –du 10 juin 1810 au 4 mars 1812- de l’État du Massachussetts alors porté par le défunt parti républicain-démocrate. Pour des raisons qui n’étaient pas claires au début, Elbridge Thomas Gerry qui était alors candidat à sa propre succession avait pour projet de redessiner la carte électorale en donnant aux districts la forme de salamandre, se profilant dans le sens est-ouest.
Dans l’ADN des grands partis d’aujourd’hui
Le parti républicain-démocrate de Thomas Jefferson (1743-1826), ancêtre des survivants actuels, les partis démocrate et républicain était alors opposé au parti fédéraliste de George Washington (1731-1799), premier parti politique américain fondé en 1790, avant de disparaitre progressivement entre 1816 et 1820.
Les opposants du parti fédéraliste se sont très vite rendus compte que le projet du gouverneur Gerry consistait, en fait, à effectuer des découpages électoraux visant à fractionner leurs bastions rendant ainsi leur électorat minoritaire dans chaque nouvelle circonscription. C’est ce qu’on appelle le gerrymandering.
Ce procédé a coûté à Elbridge Thomas Gerry son poste. En 1812, il rate sa réélection au poste de gouverneur face au candidat du parti fédéraliste Caleb Strong ; ce qui ne l’a pas empêché d’être nommé vice-président des Etats-Unis par le président James Madison –issu de la même formation politique-, fonction qu’il occupera jusqu’à sa mort. Il faut dire qu’ Elbridge Thomas Gerry est l’un des signataires, le 4 juillet 1776, de la Déclaration d’indépendance des Etats-Unis.
Un deus ex-machina qui survécu à ses géniteurs
La disparition du parti républicain-démocrate, en 1825 –donnant naissance aux actuels deux grandes formations politiques des Etats-Unis- n’a pas immédiatement emporté dans son sillage le deus ex-machina parachuté sur la scène politique par le gouverneur Gerry.
Caricature du gerrymandering dans le Massachussetts datant de 1812 (photo DS)
Il a fallu attendre la loi de 1965 sur le droit de vote pour que ce procédé soit légalement banni ; une mesure renforcée par la décision de la Cour suprême des Etats-Unis de 1983, dite Karcher vs. Daggett.
Pour autant des cas de Gerrymandering reviennent régulièrement au devant de la scène, comme le redécoupage des circonscriptions au Texas en 2003 à propos duquel la cour suprême avait estimé que la redéfinition d’une seule circonscription était inconstitutionnelle.
Actuellement, des cas de gerrymandering concernant le Texas et l’Arizona sont devant la plus haute juridiction des Etats-Unis.
Ce procédé de découpage électoral à la tronçonneuse ne vise pas que les appartenances à des familles politiques particulières. Aujourd’hui, dans les États du sud des Etats-Unis, par exemple, il vise à renforcer ou à rendre insignifiant, selon les intentions des reports des voix, le vote des minorités, afro-américaine et latino-américaine en particulier.
Dahmane SOUDANI
MaghNord 
Votre commentaire