À Khan Younes, Israël bombarde un hôpital, puis cible les journalistes venus couvrir ce nouveau carnage, tuant, sur le coup, cinq d’entre eux.
Elle et ils s’appellent Mariam abou Degga, journaliste pour Associated Press (AP),Moaz abu Taha et Mohammad Salama journaliste et cadreur d’al-Jazeera, Ahmad Abou Aziz, journaliste, Houssam al-Masri, journaliste correspondant de Reuters, plus que des journalistes et des techniciens de l’art, ces symboles de bravoure et de dévouement extrême à la profession étaient les relais de la conscience humaine dans la bande de Gaza, transformée en une véritable mare de sang par l’armée coloniale de Netanyahou. Mais ce lundi 25 août 2025, ce dernier a décidé de les faire taire en même temps que l’assassinat d’un groupe de secouristes, les espoirs de la vie, de Khan Younès (sud de la bande de Gaza).
Anesthésie des cœurs et des consciences
À Khan Younès, plus précisément à l’hôpital Nasser, la semaine commence donc mal, très mal. Cinq autres journalistes palestiniens ont été tués et le monde ferme les yeux, les oreilles et surtout les cœurs et les consciences. Pire encore, dans certains pays prétendument démocratiques, les journalistes et les internautes qui en parlent s’exposent à des sanctions et à des représailles supposées être administratives et judiciaires, en fait de véritables simulacres de procédures. Cette situation n’est pas normale, c’est travestissement mafieux de la réalité.
Le dernier drame qui a frappé les professionnels palestiniens de l’information s’est produit, lundi, aux environs de 10h du matin, heure de Palestine. L’hôpital Nasser a été la cible d’une première attaque aérienne -rappelez-vous la tragicomédie de Netanyahou lorsqu’au mois de juin dernier, il clamait, à propos des frappes iraniennes, « nous attaquons des sites militaires et ils attaquent des hôpitaux », alors qu’il est évident que l’établissement qu’il désignait était l’objet d’un souffle et pas d’une attaque directe-. On n’est pas à un déni de vérité près. Qu’à cela ne tienne !
Les secouristes et les journalistes ont aussitôt accouru vers la zone ciblée. C’est alors qu’un deuxième drone israélien vise l’endroit où les journalistes avaient l’habitude de se rassembler pour la transmission des premières annonces ou de leurs reportages.
Au moins une vingtaine de victimes
Les secouristes semblent, eux aussi, avoir fait l’objet d’une seconde attaque. Sur deux angles différents d’une vidéo, on voit d’un côté un témoin montrer aux caméras la blouse blanche d’un médical, ensanglantée, lorsqu’il est lui-même frappé de plein fouet par la déflagration d’un projectile, de l’autre, on aperçoit un secouriste faire un signe des deux mains pour demander à ses collègues d’avancer avant d’être à son tour fauché. « À l’instant, à l’instant ! la défense civile (les secouristes) a péri. Ils tuent les gens, une énorme attaque », commente la voix d’un journaliste, sans doute celui qui était derrière la caméra, avant d’être à son tour réduit au silence.
Au total, au moins, 20 personnes ont été tuées suite aux attaques israéliennes de ce lundi contre l’hôpital Nasser.
Sur la chaine MSNBC qui utilise aussi les services de Moaz Abu Taha, une commentatrice, ne laisse place à aucun doute sur l’assassinat des journalistes. Même si les psychopathes de Tel-Aviv annoncent l’ouverture d’une enquête, il en ressort que le dernier assassinat de journalistes palestiniens travaillant pour plusieurs médias internationaux, semble être prémédité et intentionnel.
« La raison pour laquelle cet endroit a été ciblé est très claire »
« Voici ce qui s’est passé, ce matin, vers 10 heures, pour donner un aperçu de la situation à notre audience. L’hôpital Nasser est le plus grand hôpital encore en état de fonctionnement dans le sud », commence-t-elle par relater. « La partie de cet hôpital qui a été touchée est très importante, comme vous pouvez le voir sur des vidéos. C’était un escalier, et la raison pour laquelle il a été ciblé est très claire : c’est là que les journalistes, depuis le début de la guerre, se rassemblent pour accéder au signal Wi-Fi. Nous y avons vu des vidéos qu’ils ont postées sur les réseaux sociaux. Notre équipe, qui travaillait juste à côté de cet escalier, les a partagées, les montrant orientant leurs téléphones vers le ciel, blottis devant leurs ordinateurs portables, au petit matin », précise la journaliste de MSNBC avant de rappeler : « Depuis le début de la guerre, depuis qu’ils ont été déplacés (de leurs lieux de travail), les journalistes se sont repliés à l’hôpital pour utiliser des ressources, comme le Wi-Fi, l’électricité et l’eau. Cet escalier, des journalistes s’y trouvaient, ce matin-là, lorsque l’hôpital a été touché, vers 10 heures, par un (premier) drone ; une minute plus tard, alors que les premiers intervenants accouraient pour couvrir la frappe, une autre frappe de drone a touché exactement ce même endroit », conclue la commentatrice.
Aveugler la conscience humaine en vitrifiant l’information
Ces nouveaux meurtres de professionnels de la santé et de l’information, pourtant protégés par le droit international, interviennent le lendemain de la déclaration digne des plus sombres moments du Moyen Âge d’Amichiai Eliyahu, ministre israélien du Patrimoine, membre du parti ultranationaliste Otzma Yehudit (Force juive) dirigé par le ministre de la Sécurité nationale de l’entité, Itamar Ben-Gvir, à la radio israélienne Kol Barama, déclaration qui ne laisse planer aucun doute sur les intentions d’Israël « Le Gouvernement est engagé dans une course contre la montre pour anéantir Gaza. Nous éliminerons, ce fléau. Nous sommes en train d’éliminer ses habitants. Gaza deviendra entièrement juive », s’épanche-t-il. La déclaration de ce ministre fait suite à une sortie pour le moins tonitruante de Netanyahou qui fait le pari de pousser les différentes plateformes internet à censurer les contenus qui ne lui conviennent pas. Combinée entre elles, ces deux déclarations font dans le genre « silence ! on détruit, on déplace et on massacre ». Alors tant qu’à faire pourquoi ne pas commencer par faire taire la référence du journalisme mondial, les professionnels palestiniens qui, au prix de leurs vies, interviennent toujours directement sur un terrain où la mort peu frapper à chaque instant.
L’inconditionnalité est la plus grave des trahisons, celle de sa propre conscience
Dans ses turpitudes sanglantes, pour aveugler la conscience humaine et en faire une « sombre endormie » comme le dit si bien Victor Hugo (L’Homme qui rit), depuis le 8 octobre 2023, Netanyahou a déjà fait assassiner 247 journalistes et professionnels de l’information palestiniens (selon le Bureau des droits de l’homme de l’ONU) et interdit toujours l’accès de la presse internationale à l’enclave palestinienne. Aveugler la conscience humaine, c’est d’abord vitrifier son premier ferment : l’information. Cela dit on est tout de même en droit de s’interroger, par quel pouvoir et de quel droit, lisibles et compréhensibles, un individu aussi addictif au sang et aux destructions, peut-il causer, en toute impunité, un aussi grave dommage à l’humanité, tout en faisant de certains dirigeants « démocratiquement élus », bien évidemment ! des simples relais de ses basses besognes ? Inutile de d’évoquer les goinfres et autres tubes digestifs, véritables gourous des média-dépendants, qui passent leur temps à roter sur les plateaux TV. Ils ont simplement perdu de vue, derrière leurs compromissions assassines, que l’inconditionnalité est la plus grave des trahisons, celle de sa propre conscience. Si tant est ils en ont encore !

Dahmane SOUDANI
Dernière minute
L’ONU et des agences de presse exigent des réponses claires et des mesures concrètes
L’ONU exige des réponses et la justice après les attaques israéliennes contre l’hôpital Nasser. « Les autorités israéliennes ont par le passé annoncé des enquêtes sur ces meurtres… mais ces enquêtes doivent aboutir », a déclaré Thameen Al-Kheetan, porte-parole du Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme, aux journalistes à Genève. « Il faut que justice soit faite. Nous n’avons pas encore vu de résultats ni de mesures de responsabilisation », a-t-il ajouté.
De leur côté, Reuters et Associated Press ont officiellement exigé des réponses des responsables israéliens après que les frappes aériennes contre l’hôpital Nasser de Khan Younis ont tué cinq journalistes, dont des contractuels et des pigistes travaillant pour ces deux médias. Dans une lettre commune, les agences de presse ont condamné la frappe sur un site civil protégé, mis en doute la crédibilité des enquêtes de l’armée israélienne et exhorté Israël à autoriser l’accès des journalistes étrangers à Gaza, tout en garantissant la responsabilité et la protection de la presse en vertu du droit international.
Les réactions
Une enquête rapide et impartiale
Le Secrétaire général de l’ONU, António Guterres, a fermement condamné les frappes aériennes meurtrières et a appelé à une enquête rapide et impartiale. Il a réaffirmé que le personnel médical et les journalistes doivent pouvoir exercer leurs fonctions essentielles sans ingérence, intimidation ou préjudice, dans le plein respect du droit international humanitaire.
Stop aux attaques
« Nous ne le répéterons jamais assez : STOP aux attaques contre les établissements de santé. Cessez le feu immédiatement. » s’élève Tedros Adhanom Ghebreyesus, Directeur général de l’Organisation mondiale de la santé en précisant que le bâtiment principal de l’hôpital, qui abrite le service des urgences, le service d’hospitalisation et le service de chirurgie, avait été touché. Les frappes ont également endommagé l’escalier de secours.
L’inaction choquante du monde
« Faire taire les dernières voix qui dénoncent la mort silencieuse des enfants et la famine, avec l’indifférence et l’inaction du monde, est en soit choquant », s’insurge le Commissaire général Philippe Lazzarini responsable de l’agence des Nations Unies pour les réfugiés de Palestine (UNRWA).
Les responsables de ces meurtres doivent rendre des comptes
« Au moins 247 journalistes palestiniens ont été tués à Gaza depuis le 7 octobre 2023 », a-t-il poursuivi. Ces journalistes sont les yeux et les oreilles du monde entier et doivent être protégés… Cela soulève de nombreuses questions sur le ciblage des journalistes. Tous ces incidents doivent absolument faire l’objet d’une enquête et les responsables doivent rendre des comptes », plaide Thameen Al-Kheetan, porte-parole du Le Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme (HCDH)









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