USA. Le réseau de corruption impliquant des cadres d’Alstom semble bien huilé

Alstom Power Inc. bien loti dans le Windsor Corporate park (photo Dahmane Soudani)

Bien lotis au fond de la zone d’activité de très haute qualité de Windsor, au nord de Hartford, la capitale de l’État du Connecticut, Alstom Power Inc. dégage une impression de quiétude et d’insouciance. Pourtant une partie de ses responsables est dans la tourmente. La justice les accuse d’avoir soudoyé des décideurs indonésiens en violation de la législation américaine.

Mis an accusation le 27 novembre 2012, après le plaider-coupable de l’Américain David Rothschild en date du 2 novembre 2012, le Français Frédéric Pierucci a été arrêté le 14 avril dernier à l’aéroport international JFK à New York. Les deux hommes sont respectivement identifiés par la justice américaine comme ancien directeur-adjoint des ventes et directeur à Alstom Power Inc., une filiale du groupe français éponyme, basée à Windsor dans le Connecticut. Ils sont poursuivis pour corruption d’un parlementaire indonésien et de hauts cadres de la l’énergéticien public du même pays Perusahaan Listrik Negara (PLN) en vue d’obtenir la réalisation d’un projet et de conserver le marché qui lui est attaché. Les faits se seraient déroulés entre 2002 et 2009 et constituent une violation grave des dispositions de la législation anti-corruption Foreign Corrupt Practices Act (FCPA)

Le projet en question est celui de la centrale électrique de Tarahan près de Lampung, (Sumatra du Sud).

Des consultants comme intermédiaires

Les noms des personnalités indonésiennes visés par cette entreprise de corruption n’ont pas été dévoilés, mais on sait qu’il d’un parlementaire qui a son mot à dire

Windsor Corporate park (photo Dahmane Soudani)

dans l’attribution de contrats par la compagnie PLN y compris celui du projet de Tarahan, un haut cadre de PLN doté de pouvoirs de décision et un autre cadre de même rang membre de la commission d’évaluation du même projet.

Outre David Rothschild et Frédéric Pierucci, au moins quatre autre personnes d’Alstom Power Inc (USA), Alstom Indonésie et du département de la région Asie du groupe, peuvent intéresser la justice américaine.

Pour soudoyer les responsables indonésiens, le système mis en place a fait appel aux services de deux consultants pour l’heure identifiés comme A et B et dont les cabinets se trouvent dans l’État du Maryland. Dans l’acte de mise en accusation de Frédéric Pierucci qui bénéficie toujours de la présomption d’innocence, comme le clame son employeur, la justice dispose d’éléments très précis. Comme par exemple le Consultant A, qui n’ayant pas donné entière satisfaction pour corrompre les responsables ciblés, a vu son rôle réduit en se faisant doubler par le consultant B à partir de septembre-octobre 2003.

Jusqu’au Japon

Dans ce même acte d’accusation, le département de la Justice ajoute : « Pierucci était l’une des personnes chargées d’approuver le choix et l’autorisation des paiements aux consultants, A et B, sachant qu’une partie des paiements aux consultants A et B était destinée à des fonctionnaires indonésiens en échange de leur influence et leur assistance dans l’attribution du contrat du projet Tarahan à la société mère et ses filiales »

Alstom Power Inc dans le Connecticut (photo Dahmane Soudani)

Selon le forum FCPA, les bénéficiaires de cette opération seraient Alstom et ses filiales américaine, suisse et indonésienne en plus d’un intermédiaire japonais qui serait, selon la même source, Marubeni Corp du Japon. C’est ce partenaire qui, dans un communiqué intitulé « Marubeni Corporation Receives Orders for Boiler and Steam Turbine Packages for Tarahan Coal Fired Steam Power Plant Project of PT PLN » datant de 2004, avait fait part de la réception de cette commande de PLN pour un montant global de 22,8 milliards de yens.

Théoriquement, David Rothschild risque une peine de 5 ans d’emprisonnement et une amende de 250 000 dollars, mais la sanction a de fortes chances d’être allégée du fait de sa collaboration avec la justice, en particulier en plaidant coupable.

On ne sait pas quelle va être la stratégie adoptée par Frédéric Pierucci pour la suite de la procédure, mais en plus de la conspiration en vue de violer la législation FCPA, il est sous le coup de quatre autres chefs d’accusation dont celui le blanchiment d’argent.

Dahmane Soudani