Libye. Les miliciens maîtres de Tripoli

Des miliciens lourdement armés occupent certains des ministères de souveraineté.

Après le ministère des Affaires étrangères (AE) dimanche et le ministère des Finances lundi, des miliciens lourdement armés ont bloqué, ce mardi, l’accès au ministère de la Justice. De leur côté, pour des revendications salariales, des policiers ont occupé le ministère de l’Intérieur.

Même si l’incursion au ministère des Finances n’a –pour des raisons évidentes- été que très brève, les accès aux bâtiments des AE et de la Justice sont toujours sous contrôle des assaillants qui exigent l’épuration des services de l’État « des anciens collaborateurs de Mouammar Kadhafi ».

Ces incursions au cœur de la capitale libyenne interviennent après l’échec de l’adoption par le Congrès général national (CGN), la plus haute instance politique du pays, d’un projet de loi allant dans le même sens.

Qui tire les ficelles ?

En réalité, les opposants à ce projet de loi redoutent une confusion entre les cadres politiques de l’ancien régime et les cadres administratifs de la nation.

Exclure les cadres supérieurs des administrations publiques, reviendrait, tout simplement, à achever l’État libyen déjà très amoindri par les révoltes de 2011, tant la confusion entre régime et institutions de l’État, souvent encouragée, en toute connaissance de cause, de l’extérieur, a été tragique pour le pays aujourd’hui plongé dans l’anarchie. Il y a quelque temps, un ancien cadre de l’État tunisien, désabusé par l’expérience du mouvement islamiste Ennadha, avait confié à Jean-François Lépine de Radio Canada « Comment peut-on convaincre des investisseurs quand vous n’avez à offrir, comme expérience de gestion, que des années passées en prison ou dans la clandestinité ?». Cette problématique peut être transposée à la gestion des affaires publiques dans le contexte libyen et ce d’autant que les prétendants à la relève ont pris goût à rançonner le Trésor public.

Ces occupations des ministères de souveraineté par miliciens armés de pistolets mitrailleurs, canons anti-aériens et de lance-roquettes ont-elles spontanées ou inspirés de l’intérieur du CGN ? La question mérite d’être posée.

Dahmane Soudani